Les Echos a écrit:Il n'y a pas d'effet TGV Méditerranée
ALAIN TRANNOY
Depuis l'inauguration, le 10 juin 2001, du TGV Méditerranée, Marseille n'est plus qu'à trois heures de Paris. Les autres villes provençales, languedociennes ou de la vallée du Rhône ont vu également leurs temps de parcours ferroviaire considérablement baisser pour rejoindre la région parisienne. Ce TGV est incontestablement un grand succès qu'atteste un fort taux d'occupation. A en croire l'antienne, l'arrivée du TGV n'aurait pas eu que des effets positifs, car il serait responsable de la montée des prix de l'immobilier à Marseille et dans sa région. Cette augmentation a effectivement été plus rapide à Marseille que dans les grandes villes de province depuis la mise en place du TGV. Mais cela ne prouve rien. La seule stratégie permettant de valider (ou non) cette idée reçue serait de comparer la croissance des prix immobiliers à celle qui aurait prévalu en l'absence de cette ligne à grande vitesse, ce qui est par définition... impossible.
Un raisonnement indirect est toutefois possible et infirme la thèse selon laquelle l'afflux de population dans la région est à l'origine de cette hausse. Le TGV n'a pas provoqué d'accélération de la croissance de population dans les départements qu'il traverse directement (Drôme, Vaucluse, Gard, Hérault, Bouches-du-Rhône, Var). En effet, si l'on compare le surcroît de population entre 1999 et 2004 dans ces départements à la hausse qu'ont connu ces mêmes départements entre 1990 et 1999, force est de constater... que l'on assiste à un ralentissement : la population n'y a augmenté que de 281.000 personnes alors qu'elle avait augmenté dans la dernière période intercensitaire de 356.000. Toutefois, cela ne prouve rien encore. Il se pourrait également que ce mouvement de repli soit général et concerne également toute la France hors agglomération parisienne non traversée par le TGV Méditerranée. C'est exact, la population a moins augmenté dans ces départements entre 1999 et 2004 (1.142.000 personnes) qu'entre 1990 et 1999 (1.262.000 personnes) mais le repli est moindre. La baisse n'est que de 10 % pour cette partie de la France alors qu'elle est de 21 % pour les départements traversés par le TGV. Alors que ces départements ont bénéficié d'un atout supplémentaire du fait de cette innovation technologique, ils ont connu une décélération de leur croissance démographique plus forte que les départements n'ayant pas connu l'introduction d'un équipement analogue. Ce constat infirme l'idée naturelle d'un afflux particulier de population dans le Midi qui serait induit par le TGV Méditerranée et, par ricochet, celle d'une flambée de la demande de terrains ou logements qui se serait répercutée dans les prix.
Après tout, il n'est pas difficile d'imaginer la raison pour laquelle le TGV Méditerranée n'a pas généré cet afflux de population. Grâce au TGV, il est plus facile de séjourner dans le Midi pour de courtes périodes, un week-end par exemple. Le midi de la France étant plus accessible depuis Paris, cela peut atténuer l'envie de déménager de manière définitive puisque les escapades occasionnelles sont plus faciles. On pourrait donc s'attendre à ce que le TGV Méditerranée ait entraîné un afflux de population saisonnière, avec une augmentation des résidences secondaires, ce qui aurait été de nature à peser sur les prix. Le même type de raisonnement que celui effectué plus haut infirme cependant cette thèse, on constate, selon les premiers chiffres du recensement sur la période 1999-2004, une décélération de la croissance du parc de résidences secondaires dans toute la France et celle-ci est encore plus marquée dans les régions traversées par le TGV, la région Paca et la région Languedoc-Roussillon !
La hausse des prix de l'immobilier dans le Midi, supérieure à celle des autres régions, peut donc s'expliquer soit par un phénomène de rattrapage des prix, comme dans le cas de Marseille qui partait de très bas, soit par un pur phénomène spéculatif qui retombera lorsque l'on constatera que la demande de logements n'est pas au rendez-vous. Ajoutons d'ailleurs que la hausse des prix de nature essentiellement spéculative a pu dissuader des personnes de s'installer dans le Sud-Est de manière définitive ou temporaire pour s'installer de préférence dans d'autres régions. C'est peut-être là l'une des raisons du redémarrage démographique du Massif central.
ALAIN TRANNOY est directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) et directeur de l'Idep (Institut d'économie publique).
G.E. a écrit:Oui, il y a un TGV Melun <> Sens <> Laroche-Migennes <> Lyon-Part-Dieu <> Avignon-TGV <> Marseille A/R par jour...
Reste que cette liaison est fortement subventionnée par la région Bourgogne, sans quoi elle n'existerait pas !
Cette ligne nous donne un exemple des liaisons TGV que l'on peut développer dans toute la France grâce au super réseau qui existe et se profile...
Alexandre a écrit:Je me demande si il y a beaucoup de fréquentation sur cette liaison...
Jacques Attali, sur le site slate.fr, a écrit:Le TGV, miroir d'une Europe endormie
Quand les grilles horaires des trains reflètent le dynamisme des pays et des continents.
Le TGV, fleuron de l'ingénierie française qui transporte ses passagers à 300km/h, et peut atteindre les 574km/h. Signe de la vitalité française ? Du dynamisme européen ? Voire....Un rapide coup d'œil sur la grille horaire du TGV (et sur celles des avions de ligne) nous révèle trois choses.
Il est impossible de revenir à Paris après un dîner en province
Impossible de diner face à l'Eglise Saint-Thomas si l'on travaille le lendemain matin à la Défense, le dernier TGV reliant Strasbourg à Paris part à 20h20. La rosette ne sera pas non plus au menu puisqu'il faudra se rendre à la gare de Lyon-Perrache avant 21h. Ne rêvons même pas d'une bouillabaisse sur le vieux port ou de la joie de déguster un Saint-Julien sur place puisque les derniers TGV de Marseille et Bordeaux, à l'exception des dimanches, partent respectivement à 20h28 et 19h51.
Et tous ceux pour lesquels le retour est une nécessité, ceux dont la réunion à Bordeaux se termine plus tard que prévu et doivent impérativement rejoindre la capitale, ceux qui manquent le coche et qui ont fait garder leurs enfants jusqu'à minuit. Pour eux, un seul choix, le corail ou le train de nuit. Quatre à cinq fois plus long, ils vous déposeront à bon port, mais au prix de quel effort ! Car, en plus, il n y a pas de TGV permettant d'arriver avant 8h à Paris.
Il est impossible de revenir en Province après un diner à Paris
Mais Paris, ville lumière, ses centaines de restaurants, ses milliers de bars, est beaucoup plus active que les autres villes de France.
Mais pas mieux : Pour se rendre à Strasbourg, il faudra courir pour attraper le dernier TGV de 21h24. Pas de dessert ou de troisième acte non plus pour ceux qui rentrent sur Bordeaux ou Lyon, leurs trains sont respectivement à 21h35 et 21h54. Quant aux marseillais, ça ne leur sert pas à grande chose d'hésiter entre le train et l'avion, l'un part au plus tard à 21h16, l'autre à 21h10. Seuls les Lillois pourront digérer presque en paix grâce au TGV de 22h58.
Une France endormie dans une Europe dynamique ? Non, tout comme Paris, les autres capitales européennes se couchent tôt.
Il est impossible de diner dans une capitale européenne et rentrer à Paris
L'Union européenne, un espace commun, partagé par tous les citoyens. Bruxelles n'est plus qu'à 1h30 de Paris, Londres à 2h30. Pourtant, là encore, à l'exception de Bruxelles, capitale de l'Europe oblige, aucun de ces trains ne part vers Paris après 21h15. Le dernier Eurostar en partance de Londres pour la capitale française n'est qu'à 20h05. Quant au dernier Thalys pour Paris depuis Amsterdam, il est à 18h26 et, depuis Cologne, à 18h14 !
La vieille Europe n'en a pas que le nom
Comparée aux Etats-Unis, pourtant peu connu pour son maillage ferroviaire, le vieux continent a un train de retard. Un train relie New York à Washington toutes les heures jusqu'à 22h15. Le dernier avion du shuttle New York Washington quitte la Guardia à lui à 22h30. Sur la fameuse voie Washington-Baltimore, le dernier départ est à 23h35.
Le shikansen, le train à grande vitesse japonais, relie toutes les villes de la mégalopole qui va de Tokyo à l'ile de Kyushu, à presque n'importe quelle heure du jour ou de la nuit : les derniers Tokyo - Kyoto et Tokyo- Osaka sont respectivement à 23h57 et 23h19, les premiers trains sont aux alentours de trois heures du matin et non vers les 7 heures, comme en Europe.
Là où Paris, Amsterdam ou Bruxelles sont des villes endormies, New York et Tokyo sont des villes vibrantes, sans cesse en mouvement. Et quiconque connait le reste de l'Asie en dira plus encore.
Alors pourquoi ? Pourquoi pas de TGV (ni d'avion) après 21h ? Par ce que ce n'est pas rentable, vous répondra-t-on. Qu'en sait-t-on ? N'est ce pas typiquement un domaine où l'offre crée la demande ? Parce que les lois sociales nous protègent mieux que d'autres du travail de nuit ? Voire ! La vie culturelle, qui nous est si chère, est d'abord nocturne; le travail de nuit en est la condition. Et les transports de nuit sont la condition nécessaire de la présence des spectateurs aux concerts, au théâtre, au cinéma, dans les restaurants.
Pas question ici de faire l'apologie indifférenciée du travail de nuit, ou de celui du week end. Juste de constater une réalité : L'Amérique veille, l'Asie s'éveille, l'Europe s'assoupit.
Jacques Attali
Auriom a écrit:Allez, on va mettre ça là : où l'on déplore que le TGV, comme l'avion, se couche tôt.
glouby a écrit:Je ne pense pas que beaucoup de personnes résonnent de la sorte.
Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur enregistré et 1 invité