Et voilà ce qu'en disait la Cour des Comptes en 1999, c'est passionnant. Il ne nous manque plus que des cartes...
La liaison Angers-Tours a fait l’objet dès le début des années
70 de nombreuses études relatives tant au choix du tracé qu’aux
caractéristiques et au statut à donner à la future voie. Le CETE de
Nantes, chargé des études préalables a produit en décembre 1975
une analyse qui comparait trois familles de tracés et concluait, au
regard du trafic escompté et des difficultés d’ordre technique, que la
variante par la vallée de la Loire était la moins intéressante. Les
divergences entre les élus du Maine-et-Loire et ceux d’Indre-et-Loir,
relatives au choix du tracé et au statut à donner à la voie, vont durer
plus de 10 ans : une enquête publique, sur un projet de route
expresse longeant la Loire et empiétant sur le lit du fleuve au droit de
Langeais, se déroule du 12 au 20 janvier 1987 ; les impacts d’ordre
hydrologique et hydraulique conduisent le ministère de
l’environnement à donner un avis défavorable. Le Conseil d’Etat
donne un avis défavorable en s’appuyant sur un vice de forme
(publications dans la presse non conformes) et le ministère de
l’équipement abandonne la procédure.
La question du statut rebondit et une seconde enquête sur la
liaison Angers-Tours, avec statut autoroutier mais sans péage entre
St. Patrice et Tours, est lancée le 25 mai 1989 : au droit de Langeais,
le dossier comporte une comparaison avec un tracé passant au nord
de l’agglomération. Le tracé proposé ne diffère pas sensiblement du
précédent. Dans son avis, la commission d’enquête préconise l’étude
d’un tracé nord en raison des difficultés d’insérer l’autoroute entre la
ville de Langeais et la Loire, le tracé proposé à l’enquête passant en
particulier entre le château de Langeais et le fleuve. Lors de la
procédure administrative, le ministre de l’environnement donne un
avis défavorable en raison du passage dans le lit mineur de la Loire et
des risques que ferait peser un tel projet sur la nappe phréatique à
l’ouest d’Ingrandes de Touraine, dans le secteur du Val d’Authion. Le
Conseil d’Etat donne également un avis défavorable, mais après
arbitrage des services du Premier ministre, la déclaration d’utilité
publique est prise le 7 janvier 1991. Concernant la section Angers-
Ingrandes de Touraine, le remblai de l’autoroute pouvant entraîner en
cas de rupture de la digue de la Loire une augmentation de la gravité
des inondations, des travaux de protection ont du être entrepris et des
seuils réalisés sur l’autoroute pour faciliter l’écoulement des crues. Le
surcoût dans le Val d’Authion est estimé par le ministère de
l’aménagement du territoire et de l’environnement à 300 MF. Par
ailleurs, une des zones d’emprunts de matériaux est localisée dans
une zone humide avec nappe phréatique affleurante qui sert à
l’alimentation en eau potable de 300 000 personnes.
A la mi-1993, les oppositions persistantes à la partie du tracé
située au droit de Langeais, conjuguées à la mise en oeuvre du plan
Loire, conduisent le Ministre de l’Environnement à remettre en cause
ce tracé, puisqu’il passe encore dans le lit de la Loire et nécessite la
construction d’une digue de 600 mètres. Le dossier des
“ engagements de l’Etat ” établi par la direction des routes indique que
“ après la déclaration d’utilité publique, les études plus fines du tracé
entre Saint Patrice et l’est de Langeais, situé en bord de Loire, ont
montré les limites de l’optimisation de l’intégration du tracé autoroutier
dans un environnement paysager, patrimonial et humain
particulièrement sensible. C’est pourquoi, il est apparu souhaitable de
réexaminer le projet autoroutier sur cette section ”.
Un communiqué des ministres de l’équipement, de
l’économie, de la culture et de l’environnement en date du 9 mars
1994, annonce la décision, prise après avis du Conseil d’Etat, de
mettre à l’enquête une solution de contournement de Langeais par le
nord qui se raccorderait au projet initial à Ingrandes de Touraine à
l’ouest et à l’est sur l’ouvrage récemment terminé qui franchit la Loire
à Cinq Mars la Pile, la DUP de 1991 restant valide pour le reste du
tracé.
Cette section de contournement nord de Langeais a été
déclarée d’utilité publique par décret du 5 janvier 1996 nonobstant
l’avis défavorable de la commission d’enquête. Les services du
ministère de l’aménagement du territoire et de l’environnement
indiquent que “ le tracé nord n’est pas exempte d’impacts
environnementaux : insertion paysagère délicate liée au double
franchissement du coteau, traversée sur le plateau de zones
naturelles sensibles dont la vallée de la Roumer, atteinte de quelques
parcelles d’appellation contrôlée ” et nécessite des mesures de
sauvegarde d’un site archéologique.
La DUP du contournement nord de Langeais fait l’objet d’un
recours contentieux auprès de la Cour européenne de justice pour
atteinte à des secteurs biologiques sensibles.
L’autoroute A 85 est ainsi révélatrice des conséquences de
l’insuffisance des études préliminaires. Comme l’indique le ministère
de l’environnement, “ il est certain que dans ce dossier préalablement
“financé dans le cadre des contrats de plan, où l’avis des élus joue un
“grand rôle, les arbitrages de l’Etat n’ont pas été facilités. Toutefois on
“peut regretter que des études de faisabilité, des reconnaissances
“géotechniques n’aient pas été entreprises dès les études amont.
“Outre une meilleure information des élus au moment de la phase de
“consultation, elles auraient permis de limiter les impacts sur la
“ressource en eau et les dérives financières de ce projet ”. Quel que
soit le tracé définitivement retenu, qui est désormais contraint par le
tracé retenu en amont et en aval de Langeais, il ne peut que tenter de
minimiser les conséquences du choix initial de passage par la Vallée
de la Loire dont les incidences n’avaient pas été suffisamment
étudiées.