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Il y a 50 ans, on payait pour emprunter le pont de Noirmoutier
Cette année, le pont de Noirmoutier fête ses 50 ans. Ce que certains ne savent pas et que d’autres ont peut-être oublié, c’est qu’il n’a pas toujours été gratuit.
3 francs. Tel a toujours été le prix payé par les insulaires. Un tarif qui n’a jamais changé en vingt-cinq ans, contrairement à celui acquitté par les continentaux.
1971, deux tarifs en vigueur
Dès son ouverture à la circulation en juillet 1971, le pont de Noirmoutier est payant dans les deux sens. Deux tarifs sont appliqués au péage : 3 francs pour les insulaires qui avaient espéré la gratuité du passage, et 5 francs pour les autres. Ils resteront les mêmes jusqu’en avril 1974. On fait alors la distinction entre les Vendéens et les autres continentaux qui payent respectivement 5 francs et 6 francs. Les droits de péage sont encaissés par le conseil général (départemental aujourd’hui) qui a voté 45 millions de crédits pour la construction du pont et des voies d’accès et 38,5 millions d’emprunts.
1975, une première alerte
En décembre 1975, le groupe du Pont de Noirmoutier, qui regroupe des conseillers généraux, les maires de l’île et de Fromentine et des fonctionnaires, propose une augmentation des tarifs : 4 francs pour les insulaires et un tarif unique de 8 francs pour tous les continentaux. La réaction des élus de l’île est unanime. « L’augmentation de 33 % pour les insulaires provoquera des remous. » La population noirmoutrine est en alerte.
Le 1er janvier 1976, de nouveaux tarifs sont mis en application. Les îliens poussent un soupir de soulagement. Leur tarif reste fixé à 3 francs. Celui des Vendéens passe à 6 francs, et 8 francs pour les autres usagés.
1977, l’année de la colère
À la session d’octobre 1976 du conseil général, l’augmentation des tarifs est à nouveau inscrite à l’ordre du jour. Les quatre maires de l’île, André Gaborit (Barbâtre), Benjamin Penisson (L’Épine), René Ganachaud (La Guérinière) et Louis Dauptain (Noirmoutier-en-l’Île) protestent vivement. Ils sont soutenus par Jacques Oudin, nouvel élu au conseil général.
L’augmentation est remise à janvier 1977. Plan Barre contre l’inflation et élections municipales proches sont peut-être à l’origine du nouveau sursis pour les insulaires. Les nouveaux tarifs sont finalement fixés le 7 juin. Les insulaires paieront 3,50 francs, les autres usagers, 6 francs hors saison et 9 francs, du 15 juin au 15 septembre. Jacques Oudin annonce sa démission qui sera effective le jour de la mise en application des nouveaux tarifs.
Les recettes encaissées par le Département compensent largement le coût de l’amortissement des emprunts et le coût de fonctionnement du pont. L’augmentation de 16,66 % du tarif insulaire ne rapporterait que 75 000 francs sur un excédent prévisible de 1,2 million. « Une goutte d’eau qui apparaît un peu comme une brimade et une injustice. »
Sur l’île, une pétition est ouverte pour demander le maintien des 3 francs. Le 11 juin, une première manifestation a lieu dans le calme sur le pont, une autre le 23 juillet.
Le 3 novembre, changement de décor : la gendarmerie verbalise au péage les automobilistes qui refusent de verser les fameux cinquante centimes. Le lendemain, le poste de péage est à nouveau bloqué et, à 18 h, tous les maires et adjoints de l’île annoncent leur démission. Ils sont soutenus par les maires des communes continentales voisines.
Le 5 novembre, les îliens dressent une barricade sur le pont et entretiennent des feux de pneus. Le 6 novembre, les renforts arrivent : 300 hommes prêts à exécuter les ordres. Le 7 novembre, des îliens franchissent la grille de la préfecture. Le conseil général et le préfet reviennent sur leur décision. Les anciens tarifs resteront en vigueur jusqu’à la décision du tribunal administratif saisi par Jacques Oudin. Tout cela pour 50 centimes. Les Noirmoutrins ont la tête dure ! « Nous n’avons pas cherché la bagarre, mais seulement la justice et l’égalité. »
1994, la suppression du péage
Une loi de 1979 stipule qu’il n’est plus possible de percevoir des redevances sur les ouvrages d’art dès lors que les emprunts les concernant sont remboursés. Le Département doit donc supprimer le péage, se privant d’un manque à gagner important (bénéfice net en 1993 égal à 7 millions de francs). Le pont de Noirmoutier devient gratuit le jeudi 30 juin 1994, à 20 h.
Plus de trente millions d’automobilistes se sont acquittés du péage depuis son ouverture. Pour la seule année 1993, les dix-neuf salariés de la régie ont enregistré 1 777 841 passages avec une pointe de 350 000 au mois d’août. Les guérites désaffectées resteront en place longtemps… À cette époque, l’idée d’une écotaxe flottait déjà dans l’air.
Je ne savais pas que le péage avait été supprimé la même année que celui du pont de St Nazaire. Je me souviens bien de celui - là dans la presse de l'époque mais pas de celui du pont de Noirmoutier.