L'Etat en rêve depuis longtemps : il a d'ailleurs négocié avec certains départements (RN162 en Mayenne, non finalisé), il essaie avec d'autres (RN102 en Haute-Loire), et a réussi un coup de maître en Alsace (les collectivités alsaciennes ne vont pas tarder à comprendre leur naïveté d'assumer les dépenses des routes sans le bénéfice des recettes, mais que ne ferait-on pour un bout de pouvoir...).
On voit bien sur ce forum au fil des axes que l'Etat n'arrive plus à gérer son réseau : ses investissements sont en chute libre, les coûts explosent en raison de normes trop changeantes et contraignantes (qu'il fixe lui-même d'ailleurs !) et le budget ne suit pas faute d'être défendu correctement par les élus de la nation. Du coup, les calendriers déjà peu ambitieux dérivent, de nombreux axes sont à peine entretenus quand d'autres attendent désespérément des crédits.
A défaut d'une mise en concession de certains axes, on voit bien que seul un transfert à des collectivités dynamiques pourrait permettre de faire bouger les choses. Si l'Etat maintenait son budget déjà bien maigre sur un nombre plus réduit de km, il pourrait encore conserver une capacité à investir. Mais c'est très conditionnel.
Et les régions sont-elles le bon échelon ?
On pourrait dire oui en Bretagne vu le dynamisme de la région et oui en Ile-de-France vu la densité et la cohérence du réseau (à ajuster dans les deux cas pour encore plus de cohérence), mais dans bien d'autres cas, un transfert aux départements serait plus pertinent. Et encore, beaucoup de collectivités locales se caractérisent par leur mollesse dans les investissements et/ou leur propension à gaspiller leurs rares crédits dans du superflu. L'Essonne citée dans l'article est justement un des mauvais élèves qui dénature son réseau structurant (quelle idée d'implanter des giratoires sur une ex-RN20 saturée ?!) et n'investit pas assez.
On n'a pas fini d'en parler !
La Gazette a écrit:Transfert des routes nationales : les régions n’en veulent pas !
Publié le 20/01/2021 • Par Nathalie Arensonas • dans : A la une, A la une, actus experts technique, France
L’avant projet de loi 4D (déconcentration, déconcentration, différenciation, dé-complexification) dont la date de présentation en conseil des ministres est incertaine prévoit la possibilité de transférer des portions de routes nationales aux régions. Traditionnellement compétents, les départements sont vent debout. Quant aux régions, elles déclinent l’offre.
C’est une interview de Jacqueline Gourault, mi-décembre 2020 dans Les Echos qui a mis le feu aux poudres. La ministre de la Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales confiait que dans le cadre de la loi 4D (déconcentration, déconcentration, différenciation, dé-complexification) dont l’avant-projet pourrait être présenté début février en conseil des ministres, le gouvernement envisageait de transférer des portions de routes nationales aux régions volontaires.
« Nous sommes tombés de l’armoire ! Cette disposition avait été écartée dès les premières discussions avec le ministre des Transports et l’audition du directeur général des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) », s’étonne François Durovray, président du Conseil départemental de l’Essonne et de la commission mobilités de l’Association des départements de France (ADF).
5 000 km concernés
Sur les 12 000 kilomètres de voies nationales (hors concessions) gérées par l’Etat, ce dernier estime qu’environ 5 000 km n’ont pas vocation à rester dans son giron et pourraient passer dans celui des régions, si elles le demandent. L’Etat veillerait à la cohérence des itinéraires. « Un signe de défiance aux départements », fustigent les élus de l’ADF dans un courrier adressé à la ministre début janvier, cosigné par 30 présidents de conseils départementaux.
« Si, comme nous, vous souhaitez que ce nouvel élan à la décentralisation se traduise par une réelle dé-complexification, vous partagerez certainement nos doutes quant à l’introduction d’un niveau supplémentaire, le niveau régional, dans le domaine des routes », poursuivent-ils dans ce courrier dont la Gazette des communes s’est procurée une copie.
« Ce n’est pas une guerre de clocher, c’est juste une mauvaise décision, car les régions n’ont pas l’expertise technique acquise depuis 40 ans par les départements pour la gestion et l’entretien du réseau routier », ajoute François Durovray. « Les régions pourraient s’appuyer sur les services techniques des départements [ils gèrent et entretiennent 378 000 km de routes, hors transfert aux métropoles, ndlr] », répond le ministère.