L'histoire de l'A46 et des autres projets de l'Est lyonnais est un peu plus compliquée que ça... D'ici quelques mois je pense que j'aurai fini de récolter les documents aux Archives (à Lyon, c'est un peu dispersé entre les archives départementales, celles de la Courly et celles de l'ex-DDE, gérées de façon autonome...) et que je serai en mesure de rédiger un historique à peu près complet pour le Wiki. En attendant, voici quelques premiers éléments :
La première mention officielle du tronçon entre Neyron et Rillieux date du 30 décembre 1960, dans la prise en considération ministérielle du Plan Directeur du Groupement d'Urbanisme de la Région Lyonnaise : l'autoroute de sortie Nord-Est vers Genève comportera "une bretelle de jonction à la R.N. 83 vers Bourg et Strasbourg", de 4 km de long entre le carrefour du Barrie et Vancia, utilisant le ravin de Sermenaz pour franchir l’obstacle topographique de la « Côtière des Dombes ». Outre les objectifs nationaux (amorce d’une liaison rapide vers Bourg-en-Bresse), un des objectifs locaux de cette bretelle de Vancia est d'assurer la desserte de la future ZUP de Rillieux prévue au Plan Directeur. Dans la nomenclature des autoroutes publiée par l'arrêté du 25 février 1963, l'autoroute de sortie Nord-Est est désignée "A 42 - De Lyon à Montluel (Ain)" et la bretelle vers Rillieux est baptisée "B 42 - Branche de Vancia (Ain)" (aujourd'hui Vancia est dans le Rhône).
A la même époque (1960-62), les services de l'Urbanisme et ceux des Ponts et Chaussées du Rhône entreprennent de définir les grandes lignes d'une "Bretelle Est" qui pourrait se substituer à deux projets anciens qui devaient irriguer l'Est lyonnais et qui avaient été abandonnés : d'une part les voies latérales d’un canal de ceinture que devait construire la C.N.R. (Compagnie Nationale du Rhône) et d'autre part une liaison routière entre Feyzin et l'aéroport de Lyon-Bron. L'objectif de cette bretelle Est est double : permettre le contournement de Lyon par l'Est en assurant "une liaison commode entre les autoroutes Lyon-Vienne, Lyon-Chambéry, Lyon-Genève et l'aéroport de Lyon-Bron" mais ayant surtout "une fonction plus locale de réunir les zones industrielles de Saint-Fons, Vénissieux, Saint-Priest, Villeurbanne, Décines et Vaulx-en-Velin avec le Nord et le Sud-Est de l'agglomération où se trouvent d'importantes zones d'habitation". L’implantation de cette bretelle ayant une influence directe sur certains projets d’urbanisme envisagés en banlieue Est, le préfet du Rhône en présente les grandes lignes lors de la première session du Conseil Général en 1963.
L’origine et l’extrémité de cette voie nouvelle sont plus ou moins imposées : "Au Nord, en effet, il est tout indiqué de rejoindre l’autoroute Lyon-Genève au carrefour du Barry, là où se branche la liaison Lyon-Bourg qui dessert la ZUP de Rillieux. Au Sud, d’autre part, il faut rejoindre le C.D. 95 qui ceinture la très importante ZUP de Vénissieux et qui rejoint l’autoroute Lyon-Vienne". Entre les deux, le problème principal est le contournement de l’aéroport de Lyon-Bron. Un passage par l’Est conduirait à un tracé très long et de forme circulaire. De plus, il ne permettrait pas la desserte des zones industrielles de Villeurbanne, Décines et Vaulx-en-Velin. C’est donc le contournement par l’Ouest qui s’impose "tout naturellement", son tracé reprenant d’ailleurs une partie de celui du canal abandonné au niveau de la commune de Bron.
(Nota : Au début des années 1960, les services de l’Urbanisme et des Ponts-et-Chaussées étudiaient également une Bretelle Ouest, obtenue par le prolongement de la Rocade Ouest A44, initialement prévue entre l’A6 à Champagne-au-Mont d’Or et l’A45 à Saint-Genis-Laval, jusqu’au Sud de Vienne par la rive droite du Rhône. Les deux bretelles Est et Ouest figurent sur ce
schéma de 1963 que j’ai enregistré à tout hasard sur le Wiki. Fin 1972, le contournement autoroutier Ouest en direction de Givors et de Vienne est abandonné au profit du contournement autoroutier Est A46 qui, lui, devient prioritaire du fait de la volonté d’aménager l’agglomération lyonnaise vers l’Est.)
Très vite, la Bretelle Est est complétée par un tronçon Nord, entre Vancia et Quincieux, pour rejoindre l’A6 au niveau d’Anse et ainsi réaliser une liaison A6-A7 par l’Est de Lyon. Dans les études des Ponts et Chaussées, elle prend le numéro A46 à partir de 1964-65. Ce numéro provisoire est validé dans une note du 11 septembre 1967 du Directeur des Routes aux Directeurs Régionaux et Départementaux de l’Équipement, consacrée à la nomenclature non officielle des nouveaux projets autoroutiers : « A46 : Contournement Est de Lyon, de A7 (Feyzin) à A42 (Neyron) (éventuellement A6 Anse) ».
Je n’ai pas encore retrouvé tous les dossiers mais l’avant-projet du tronçon A42-A7 a été transmis à l’administration centrale le 7 février 1967 et approuvé par Décision Ministérielle le 3 mars 1969. L’enquête d’utilité publique a lieu vraisemblablement en septembre 1969. Le dossier d’enquête précise que l’autoroute comportera, à terme, deux fois trois voies entre l’A7 et l’autoroute LY4 (Sud de Vénissieux) et deux fois quatre voies entre LY4 et A42. Le viaduc sur le Rhône et le canal de Miribel, d’une ouverture totale de 630 mètres, sera construit à deux fois trois voies et sera complété, à terme, par deux ponts latéraux portant des chaussées collectrices à deux voies chacune.
Le 5 novembre 1970, le Ministre de l’Équipement et du Logement, Albin Chalandon, signe le décret déclarant l’utilité publique de l’autoroute A46 entre Crépieux-la-Pape (A42) et Saint-Fons (A7) mais les protestations sont telles au niveau de la commune de Bron que le même ministre promet, à l’occasion d’un déplacement le 18 octobre 1971, que la voie qui sera construite sur ce tracé n’aura pas les caractéristiques d’une autoroute mais, probablement, d’une simple route express départementale. L’autoroute de contournement sera construite ailleurs… Les élus locaux s’empressent d’obtenir de l’administration un courrier clair précisant que la déclaration d’utilité publique de 1970 concernait spécifiquement la construction d’une autoroute et qu’elle ne pourra pas être utilisée pour construire une simple voie rapide départementale sur le même tracé. Une nouvelle procédure sera engagée « en temps opportun » (courrier du Directeur des Routes au Président du Comité Brondillant de Défense de l’Environnement, daté du 14 mai 1973).
Dans les schémas routiers à long terme, l’ancien tracé de la Bretelle Est A46 prend alors le nom de voie rapide LY13 et l’autoroute A46 est décalée loin vers l’Est, au-delà de Meyzieu et Genas, devenant du coup une autoroute de rase campagne. Elle se détache de l’A42 entre La Boisse et Montluel (avec une antenne de liaison à la RN 84) et on prévoit de la faire aboutir sur l’A43 au niveau de Saint-Laurent-de-Mure, dans l’axe du projet de prolongement de l’A47 entre Givors et Satolas. Sur la carte du
"schéma de grande voirie pour le long terme" du SDAU de la région lyonnaise publié le 20 mars 1978, le contournement Est de Lyon est ainsi constitué de deux parties distinctes : au Nord, le tronçon Anse (A6) – Les Échets – Neyron (A42) et, à l’Est et au Sud, le tronçon La Boisse (N84) - A42 – Saint-Laurent-de-Mure A43) – Ternay (A7).
De façon assez inexpliquée, aucun document officiel (au niveau ministériel) ne prend alors en compte l’éventualité d’une liaison directe entre Les Échets et La Boisse qui aurait assuré la continuité entre ces deux tronçons (grosso modo : l’actuelle A432 Nord). Pourtant cette liaison est envisagée dans de nombreux plans de la DDE qui, d’ailleurs, utilise régulièrement l’appellation B46 pour la section Les Échets-Neyron, comme si elle était devenue une simple branche annexe (c’est sous cette appellation qu’elle est déclarée d’utilité publique le 29 octobre 1980). Curiosité supplémentaire : alors que le Ministère a officialisé le numéro B46 par la DUP en octobre 1980, celui-ci ne figure pas dans sa circulaire du 10 février 1982 relative à la nouvelle nomenclature des autoroutes, alors que c’est cette circulaire qui a changé tous les numéros en B… Au passage, je viens de remarquer que cette circulaire ne mentionne même pas l’A46...
Ce qui se passe ensuite dans les premières années de la décennie 1980 est encore un peu flou pour moi mais j’espère bien mettre un jour la main sur les dossiers correspondants, vu que c’est à cette période que le schéma autoroutier lyonnais d’aujourd’hui a pris forme. Apparemment, on a rapidement buté sur le problème du passage de l’A46 Sud dans la vallée de l’Ozon, à Chaponnay et Marennes.
Il semble qu’à un moment (vers 1982 ?), on a envisagé de contourner ces deux communes par le Nord en reprenant un bout de LY4 (= A7bis) vers le Nord-Ouest en direction de Corbas, puis un court tronçon de LY11 (= Rocade des Villages = CD 300) vers l’Ouest en direction de Saint-Symphorien d’Ozon, avant de redescendre plein Sud, le long de la limite Ouest de la commune de Marennes. En venant du Sud, la continuité autoroutière aurait ainsi été assurée par l’A46 Sud de Ternay à Corbas, l’A7bis de Corbas à Saint-Pierre-de-Chandieu, l’A46 Est de Saint-Pierre-de-Chandieu à La Boisse via Satolas, l’A42 de La Boisse à Neyron et l’A46 Nord de Neyron à Anse.
Cette idée de tracé tortueux n’a pas tenu bien longtemps et, vers 1985, s’est imposée l’idée de « couper » tout droit par l’ex-LY11 entre Corbas et Neyron, cet axe semblant être un des rares de l’Est lyonnais dont l’aménagement ne provoquait pas trop de réactions des communes concernées (à l’exception notable de l’extrémité Sud, à Saint-Symphorien d’Ozon et Solaize qui a finalement été annulée).
Ce qu’il me reste à comprendre, c’est pourquoi une partie du tracé actuel a un statut de voie express et pourquoi le tronçon d’autoroute entre La Boisse et l’aéroport de Satolas a continué à s’appeler A46 Est en 1989, quand ont été prononcées les DUP de l’A46 Sud et de la RN 346. On a l’impression que le ministère voulait conserver l’illusion d’une continuité autoroutière A46 Sud – A43 – A46 Est – A42 – A46 Nord mais on ne voit pas bien l’intérêt…