par otto » Jeu 24 Avr 2003 13:15
AUTOROUTE. -- L'autoroute A 89 avance, même si une guerre de tranchée administrative la retarde à Beauregard de Terrasson. PDG d'ASF, Bernard Val faisait le point hier à Marsac
Avancer malgré les retards: Philippe Thomas
Il a la moustache gauloise et le parler franc. Bernard Val, pdg des Autoroutes du Sud de la France, l'a dit haut et fort hier à Marsac : « Pour un itinéraire comme celui de l'A89, qui doit relier Bordeaux à Clermont-Ferrand, on s'affranchit des limites administratives comme les départements. Et il n'y a pas de pelles qui creusent plus vite à droite qu'à gauche ». Une réponse à peine voilée au président du Conseil général Bernard Cazeau, qui vient d'adresser une lettre au pdg des ASF où il pointe une avancée des travaux plus rapide en Corrèze qu'en Dordogne.
« En Dordogne, je dois déplorer des retards systématiques dans les dates de mise en service des différents tronçons qui me conduisent à dénoncer avec la plus grande véhémence le traitement inéquitable dont fait l'objet la Dordogne de la part d'ASF », écrivait carrément Bernard Cazeau. On peut en effet s'étonner légitimement qu'entre Périgueux et Thenon les travaux soient pratiquement achevés mais que le tronçon tarde à être mis en service; d'autant plus que l'ouverture était initialement annoncée sur les panneaux et la revue d'ASF pour cet automne 2003.
A cause des élus. Le pdg des ASF a tenu à dissiper toute ambiguïté : « Ce tronçon n'est pas encore raccordé et on peut difficilement exploiter un tronçon isolé. Il n'y a pas de préférence pour l'un ou l'autre département. Seulement des retards, comme en Dordogne sous la pression de certains élus ou d'impondérables géologiques comme à la falaise de la Robertie (en vallée de l'Isle). Et à titre personnel, je n'ai pas de préférence mais une autoroute à construire.
C'est vrai que je suis Corrézien mais ma grand-mère était de Terrasson et la ferme de mon grand-oncle était à Beauregard, tout près du nouveau projet sans tunnel que nous présentons désormais pour obtenir la déclaration d'utilité publique ». Bernard Val n'a pas manqué non plus de rappeler qu'en juin 1995 le président Chirac lui-même avait déclaré que l'autoroute serait construite en commençant par les deux extrémités pour se rejoindre au milieu, « à Brive en 2007 ».
Le bout du tunnel ? Les travaux de l'A 89 en Dordogne vont désormais bon train et c'est désormais le plus grand chantier autoroutier de France : 67 km en cours de réalisation et entre 500 et 600 personnes à l'ouvrage chaque jour. « Nous sommes à l'heure partout dans le cadre de notre planning », s'est réjouit Bernard Val, tandis que Gilles Riondy, directeur d'opérations, donnait les détails.
« Tout le parcours entre Mussidan et Saint-Astier est travaillé et des murs en terre armée y sont actuellement en cours d'édification. Les 22 km de déviation autour de Périgueux sont réalisés en parfaite coordination avec la DDE pour anticiper les flux de circulation. Enfin entre Périgueux et La Bachellerie, tous les engins spectaculaires ont disparu pour laisser place à la réalisation des chaussées et des équipements de sécurité », a précisé Gilles Riondy.
Tranchées à Beauregard. C'est ensuite que les complications apparaissent. Le conseil d'Etat remis en cause la Déclaration d'Utilité Publique (DUP) du projet précédent, qui traversait le secteur de Beauregard et Villac à travers plusieurs centaines de mètres de tunnel, les ASF ont déposé un nouveau projet. En tranchées ouvertes. En dépliant les plans, Bernard Val s'est montré résolument confiant : « Comme le montrent ces vues aériennes, l'A89 passe à l'écart de Beauregard, et les conditions environnementales seront ici parfaitement respectées. Une seule maison est touchée par le nouveau tracé, à comparer avec les 120 qu'il a fallu acheter et détruire pour passer sur les falaises de La Robertie ».
Pour un peu, Bernard Val se réjouirait presque du contretemps provoqué par la contestation du projet initial. Même si l'obtention d'une nouvelle DUP prendra peut-être bien deux ans de procédure, enquête publique et décision du conseil d'Etat comprise. « On sait qu'un tunnel est deux fois plus dangereux qu'une autoroute à ciel ouvert. Et qu'il aurait fallu construire deux tubes, comme c'est obligatoire depuis l'accident du tunnel du Mont Blanc », souligne Bernard Val.
Pour fin 2007. Situé un peu plus bas que le précédent, le tracé à tranchées ouvertes coûtera moins cher et pourrait même être livré plus rapidement qu'un tronçon comportant un ou plusieurs tunnels. Si Bernard Val déplore un retard inévitable, « comme celui occasionné par la querelle entre Roussel et Cazeau (en vallée de l'Isle) où nous avions dû étudier des variantes pendant deux ans pour en revenir au projet d'origine », il affiche pourtant un optimisme sans complexe.
« Si nous avions fait un tunnel, la mise en service n'aurait pu se faire avant fin 2009, d'autant plus que les réglementations européennes vont encore se durcir. Le tracé que nous défendons désormais pourrait être mis en service fin 2007 ». La prévision du président Chirac se réaliserait à quelques mois près. Et surtout, deux ans d'exploitation de gagnés... Ce serait tout bénéf' pour les ASF...