Le Parisien a écrit:Autoroutes : frauder aux péages va désormais coûter beaucoup plus cher
A partir de ce jeudi, les automobilistes qui n’ont pas payé leur trajet devront s’acquitter d’une amende de 375 euros, au lieu de 75 euros jusqu’à présent.
Par Vincent Vérier
Le 17 mars 2021 à 18h37
Faire le petit train aux barrières de péage des autoroutes sera plus douloureux pour le portefeuille. Cette fameuse technique qui consiste à coller le véhicule précédent pour passer sans payer sera désormais plus lourdement sanctionnée.
Un arrêté paru ce mercredi au Journal officiel rend applicable l'augmentation des amendes pour les automobilistes qui ne règlent pas les péages autoroutiers. À partir de ce jeudi, cette infraction, qui était sanctionnée par une contravention de 2e catégorie, sera punie par une contravention de 4e catégorie. Concrètement, si l'envie vous prend de faire le « petit train » ou de « pousser la barrière » il vous en coûtera 375 euros au lieu de 75 euros auxquels, bien sûr, il faudra ajouter le montant du péage non acquitté.
Mais ce n'est pas tout. « L'indemnisation transactionnelle », plus communément appelée les « frais de dossier », explosent eux aussi. Ils passent de 20 à 90 euros. « Il s'agit de coller au plus près au coût réel des frais dépensés pour aller chercher les fraudeurs », confie un autoroutier.
Sécuriser la mise en place de péages sans barrière
N'en déplaise à certains, derrière ce changement, il ne s'agit pas de renflouer les caisses de l'Etat, mais plutôt de rendre possible des péages sans barrière. La loi d'orientation sur les mobilités, promulguée en décembre 2019, prévoit de les généraliser progressivement. L'installation de ces péages en flux libre, grâce à des portiques munis de capteurs posés au-dessus des autoroutes, a pour ambition de supprimer les embouteillages aux péages et de limiter l'émission de gaz effet de serre. « La suppression des barrières physiques au niveau des péages nécessite, en contrepartie, de renforcer les dispositifs visant à assurer l'effectivité du paiement du péage, indique le ministère des Transports. Il ne s'agit bien sûr pas de pénaliser des usagers qui auraient oublié de s'acquitter d'un paiement, mais de dissuader des fraudeurs récidivistes. »
Ainsi, si vous « omettez » de payer votre péage, vous serez traité différemment selon qu'il est muni d'une barrière ou non. Dans le premier cas, vous recevrez un avis de paiement du montant du trajet d'autoroute non acquitté, auquel s'ajouteront les 90 euros de frais de dossier. Vous disposez de deux mois pour le régler. Au-delà, vous devrez payer une amende de 375 euros et le montant du trajet.
Les récidivistes durement sanctionnés
Pour le fraudeur d'un péage sans barrière, le législateur a été un brin plus clément. Pendant quinze jours, les frais de dossiers ne seront que de 10 euros auxquels s'ajoutera le montant du péage non payé. Ils passent ensuite à 90 euros. Si au bout de quarante-cinq jours vous n'avez toujours pas honoré la facture, vous devrez vous acquitter d'une amende de 375 euros. « Comme il n'y a pas de barrière, il est normal d'être indulgent, justifie une source proche du dossier. On peut comprendre qu'un automobiliste oublie de régler. En revanche, celui qui pousse une barrière n'a aucune excuse. »
Et pour les phobiques au paiement des péages, le législateur, comme pour les fraudeurs des transports en commun, crée un délit d'habitude. Si, sur une période de douze mois, cinq contraventions de 375 euros demeurent impayées, vous recevrez une amende de 7 500 euros.
Enfin, n'imaginez pas échapper aux amendes en vendant votre voiture. L'administration bloquera toute cession de véhicule tant que la facture ne sera pas payée.
Les automobilistes étrangers ne seront pas épargnés
Aujourd'hui, moins de 1 % des automobilistes ne règlent pas leurs trajets. « L'enjeu est vraiment de développer le péage en flux libre, poursuit cette même source. Aux Etats-Unis et dans beaucoup de pays anglo-saxons, il est en place depuis vingt ans. » Un retard qui s'explique notamment par la position géographique de la France, accessible à de nombreux automobilistes étrangers qui échappent aux amendes. Une impunité bientôt finie. Une directive européenne, votée en 2019 et qui entrera en vigueur octobre, obligera les Etats à communiquer les coordonnées des fraudeurs.
Actuellement, en France, les péages sans barrière se comptent sur les doigts d'une main. Le plus important se trouve sur le réseau Sanef, sur l'autoroute A 4, à la sortie Boulay-Moselle (Moselle). Chez Vinci, deux expérimentations sont en cours. Une sur l'A10, à la sortie Tours Nord (Indre-et-Loire) et l'autre sur l'A837, à Tonnay-Charente (Charente-Maritime). Enfin, si la Sanef travaille à l'installation du péage sans barrière sur l'A13, deux projets d'autoroute, en cours, ont déjà intégré le dispositif. Il s'agit de l'A79, entre Sazeret (Allier) et Digoin (Saône-et-Loire), et de l'A69, entre Toulouse et Castres, qui doivent ouvrir respectivement en 2022 et 2025.