"Je veux que Saujon-Royan soit traité avant la fin de mon mandat" Sud Ouest.fr
A LA UNE/CHUTIER/Publié le 25/03/2017 à 3h45 . Mis à jour le 26/03/2017.
Avant de pouvoir réaliser les aménagements nécessaires à la fluidification du trafic à l'entrée de Royan, l'Etat concédera d'abord la RN 150 au Conseil départemental ©INFOGRAPHIE "SUD OUEST"
Dominique Bussereau entend mener rapidement à terme un vieux serpent de mer, fluidifier le trafic routier entre Saujon et l’entrée de Royan. Une problématique à tiroirs. Pour « traiter » la traversée de Médis, le Département imagine notamment d’y « enterrer » la RN 150.
Dominique Bussereau a beau jeu de rappeler le statut de la Charente-Maritime : « Le premier département en terme de fréquentation touristique. Et le Pays royannais est le secteur le plus fréquenté. » À cet égard, toutes les liaisons vers la presqu’île d’Arvert, la Côte de Beauté, les rives de l’estuaire doivent être optimisées. Il en va des infrastructures routières comme du train.
L’axe Saintes-Saujon étant enfin passé à deux fois deux voies, reste à « traiter » le barreau Saujon-Royan. Un vieux serpent de mer. Une première pierre a toutefois été posée à ce chantier avec la réalisation d’un carrefour giratoire au niveau de l’aérodrome. Il fait consensus depuis l’achèvement de voie express Saintes-Saujon que la portion Saujon-Royan ne sera pas aménagé de la même manière. « Les maires de Saujon, Médis et Royan ne le souhaitent pas », confirme Dominique Bussereau.
Crédit photo : Infographie "Sud Ouest"
« Des liaisons douces »Médis, notamment, aurait à perdre à voir une éventuelle déviation permettre aux automobilistes d’esquiver son centre-bourg (lire ci-contre). L’actuel carrefour à feux, nœud de ralentissement en période estivale, nécessite un réaménagement. Du moins est-ce l’intention de Dominique Bussereau. « Il faut supprimer ces feux », estime le président du Conseil départemental. « De même qu’il faut réaliser des liaisons douces pour mettre fin à cette coupure en deux du bourg de Médis. »
Un rond-point pourrait constituer une alternative à l’actuel carrefour à feux. C’est pourtant un tout autre scénario qu’a imaginé la direction des infrastructures routières (DIR) du Département, avec l’assentiment de Dominique Bussereau : isoler la RN 150 dans sa traversée du bourg de Médis, en l’enterrant (lire par ailleurs). Un aménagement que refuse de but en blanc le maire de la commune, Yvon Cotterre.
Bois à déclasserDes giratoires, le Conseil départemental en réalisera, néanmoins. L’un à la place du carrefour à feux entre les zones d’activités Belmont et Royan 2. L’autre, crucial, mais complexe, au niveau des feux de l’hypermarché E.Leclerc. « Là, nous manquons d’emprise. Il nous faudrait gagner de l’espace sur les bois de Belmont, du côté Saintes. Didier Quentin, propriétaire de ces bois, n’y est pas opposé. Le souci vient du classement de la zone en espaces boisés classés. Nous devons obtenir l’autorisation de la commission des sites pour la déclasser et ça peut prendre du temps », sait par expérience Dominique Bussereau.
La priorité des priorités dans cet ensemble d’aménagements consiste d’abord à obtenir le transfert de la nationale 150 de l’État au Conseil départemental. L’État ne voit pas d’un mauvais œil que l’entretien de ces kilomètres de bitume échoie à la collectivité territoriale. Au contraire. Il versera même une compensation financière au Conseil départemental au moment du transfert. « Nous sommes actuellement en train de négocier le montant de cette soulte », révèle Dominique Bussereau.
Le transfert de la N 150 acté, le président du Conseil départemental fixe déjà les chantiers prioritaires. « En premier lieu, réaliser le rond-point entre l’aérodrome et E. Leclerc. Dans un second temps, également, il faudra améliorer l’échangeur avec la rocade. Là, l’espace est suffisant pour réaliser ces travaux. » Un giratoire ne sera aménagé en face de l’hypermarché E.Leclerc qu’après ces aménagements, le temps d’obtenir le déclassement des surfaces boisées nécessaires, mais aussi de réfléchir aux flux générés par l’école et le collège Sainte-Marie. Un secteur effectivement complexe à traiter.
Pour autant, Dominique Bussereau entend voir la liaison Saujon-Royan ainsi modernisée « d’ici à la fin de (son) mandat ».
Voie enterrée ou giratoire carréLe tracé rouge visible sur cette infographie matérialise le projet soumis au maire de Médis par le président du Conseil départemental, dont la direction des infrastructures a planché sur un encaissement de la RN 150 dans une partie de la traversée du bourg de Médis. Les automobilistes, une fois engagés sur ce tronçon, ne pourraient plus quitter cet axe, pour stationner temporairement sur le bas-côté ou accéder aux commerces bordant immédiatement ce tronçon.
Yvon Cotterre refuse cette hypothèse de travail. Lui suggère l’aménagement dans le bourg d’un giratoire... rectangulaire. Une scission de la RN 150 dans le bourg, en deux voies distinctes à sens unique formant, donc, un vaste rectangle, qui créerait une nouvelle zone à aménager, en plein cœur du bourg. " Cette idée est un projet global qui se réfléchit à 15 ou 20 ans ", nuance l’édile, conscient qu’un tel aménagement nécessite une vision d’ensemble du développement de Médis.
De 16 000 véhicules par jour hors saison, le trafic monte jusqu’à 23 000 en été dans Médis Médis veut conserver les bénéfices de la 150Il est un point sur lequel Yvon Cotterre rejoint, évidemment, Dominique Bussereau. La traversée routière de la commune dont il est le maire depuis 2014 nécessite d’être traitée en profondeur. À propos de profondeur, toutefois, Yvon Cotterre ne conçoit pas qu’on puisse descendre aussi bas que le projet imaginé par la direction des infrastructures du Département et que Dominique Bussereau lui a transmis début février (lire ci-dessous).
« Enterrer » la RN 150 dans sa traversée du centre-bourg, Yvon Cotterre ne veut pas en entendre parler. « Il ne s’agirait jamais que d’une déviation qui passerait dans le bourg. » Un tel aménagement ne résoudrait en rien, selon lui, le problème posé par la présence de ce ruban de bitume et les 16 000 véhicules à qui il permet de transiter au beau milieu du bourg. « En saison, le trafic est même à 23 000 véhicules par jour ! »
L’économie pour critèreCette portion de la RN 150 pose une complexe équation. « Aujourd’hui, elle coupe la commune en deux parties qui sont devenues antagonistes. Nous sommes dans la négation de ce que doit être un centre-bourg », analyse Yvon Cotterre. Pourtant, la RN 150 est autant une bénédiction qu’une malédiction. Les commerces locaux captent une partie de ce trafic et souffriraient d’en être privés. D’où le rejet de l’idée d’un contournement de la commune.
Yvon Cotterre n’ira pas au bras de fer avec Dominique Bussereau. Les deux hommes partagent la même sensibilité politique. Pour autant, le maire de Médis n’acceptera pas n’importe quel aménagement sans qu’en soit consciencieusement pesé le pour et le contre. Yvon Cotterre sera ferme : « Toutes les propositions d’aménagement qui n’iront pas dans le sens d’une visibilité des acteurs économiques de notre commune n’auront pas notre accord ! »
Commune de quelque 3 000 habitants, limitrophe de l’« aimant » Royan, Médis ne veut pas être « une commune-dortoir », refuse Yvon Cotterre, qui veut au contraire dynamiser son tissu économique, dans le respect d’un équilibre. « Nous savons que Médis prendra sa part de l’accroissement annoncée de la population en Pays royannais, mais nous voulons nous développer raisonnablement, en conservant le côté rural de la commune. » Avec la RN 150 comme atout, non comme barrière.
"Ce serait une catastrophe"« Si la RN 150 contourne Médis ou si elle est enterrée? Notre commerce meurt. Et tout le village meurt! » Derrière son comptoir des Délices de Médis, Isabelle résume en une formule la crainte de tous les commerçants médisais. Privé de la possibilité de capter une partie des 18 000 à 22 000 véhicules traversant chaque jour la commune, le tissu économique local souffrirait, doux euphémisme. La boulangerie d’Isabelle jouxte le carrefour à feux. « Les gens qui connaissent tournent avant, en arrivant de Saintes, les autres se garent à côté de la boulangerie. On a un large trottoir », accessible sans danger depuis la chaussée de la RN 150. « On a, bien sûr, notre clientèle locale, mais aussi beaucoup de gens qui travaillent à Royan et s’arrêtent sur la route. Et nous captons les touristes l’été, aussi. »
Isoler la RN 150 en l’encaissant serait « une catastrophe », juge également Éric Bourdeau, à la tête pour quelques jours encore de la concession Renault. « Dans un tel scénario, on peut estimer la baisse du chiffre d’affaires à 60–70 %. On l’a vu dans d’autres communes. La seule solution, dans ce cas, c’est de changer d’implantation. » Éric Bourdeau ne croit pas beaucoup, toutefois, à la concrétisation de cette « idée saugrenue ».