Une solution radicale pour le syndrome des rocades urbaines autoroutières ?
http://www.charentelibre.fr/2017/05/11/ ... 101569.phpLimiter la déviation d'Angoulême à 90 km/h : qu'en pensez-vous?
Sur le pont de la Tour Saint-Jean, Jean-François Dauré montre les parois où devaient être réalisés des murs anti-bruit. «Ils n’ont jamais été édifiés».
Par Stéphane URBAJTEL, publié le 11 mai 2017 à 20h37, modifié le 14 mai 2017.
Le président de l’agglo demande au préfet de baisser la limitation de vitesse sur la rocade d’Angoulême, entre Roullet et Champniers. 90 pour les voitures au lieu de 110; 70 pour les camions au lieu de 80.
Les riverains vivent l’enfer. Je vous assure, ils sont à bout» . Sur le pont de la Tour Saint-Jean qui surplombe la RN10, route de Pombreton, entre La Couronne et Nersac, Jean-François Dauré doit hausser le ton pour se faire entendre. Selon le président de Grand Angoulême, le bruit insupportable des camions et des voitures justifie à lui seul la démarche singulière qu’il a décidé d’entreprendre: il vient d’écrire au préfet de la Charente pour lui demander d’instaurer une baisse de la limitation de la vitesse sur la rocade. Pas partout, mais sur la section qui traverse l’agglomération. Sa requête est précise: 90 km/h pour les voitures contre 110 aujourd’hui. 70 km/h pour les camions, contre 80. «Toutes les grandes villes ont fait ça: Bordeaux, La Rochelle, Nantes. Pourquoi pas nous?» , plaide Jean-François Dauré. L’élu dispose d’une panoplie d’arguments pour légitimer sa demande. A commencer par celui de la sécurité: «On ne compte plus les accidents sur cette portion de RN10. Faut-il attendre que la vitesse soit à l’origine d’un carambolage de masse pour franchir le pas ?» Les derniers chiffres de la DIRA (la Direction interdépartementale des routes Atlantique) donne de l’eau à son moulin: en 2016, la barre symbolique des 10 000 camions par jour a été franchi sur la rocade d’Angoulême, au niveau de Girac nord.
50 000 véhicules par jour dans trois ou quatre ans
Et si le trafic continue d’évoluer de la même façon, le cap des 50 000 véhicules par jour (voitures plus camions) sera atteint dans trois ou quatre ans dans les secteurs de Girac et de l’Epineuil. Le deuxième argument mis en avant par Jean-François Dauré concerne la pollution: ses services exhument une carte de Grand Angoulême particulièrement éclairante. Réalisée par Atmo Poitou Charentes en 2015, elle présente les moyennes annuelles de rejets de dioxyde d’azote, par un système de couleurs. Les quatre cinquièmes du territoire sont en vert, à l’exception d’un dégradé de jaune sur Angoulême et sa proche périphérie. Surtout, une trace jaune vif tirant sur le rouge correspond exactement au tracé de la rocade (voir la carte ci-contre). Enfin, Jean-François Dauré pointe un dernier type de pollution: le bruit. Le Plan de prévention du bruit dans l’environnement (PPBE), approuvé par l’Etat en décembre dernier a listé les zones critiques. Là encore, la rocade d’Angoulême se distingue: plusieurs logements, en bordure de la RN10 ont été répertoriés. Deux bâtiments en particulier à La Couronne où vivent six personnes. Si les propriétaires sont d’accord, le Contrat de plan Etat région (CPER) 2015-2020, devrait permettre de débloquer des fonds pour lancer des opérations d’isolation de façade. «C’est bien simple , appuie Jean-François Dauré, les gens des abords du pont de la Tour Saint-Jean ne vivent plus dehors.» Le président de Grand Angoulême estime même que les études menées en matière de bruit ne reflètent pas le quotidien des riverains de la RN10: «Les mesures réalisées établissent un niveau sonore moyen sur vingt-quatre heures: aux abords de la rocade, on est ainsi dans les normes à plusieurs endroits quand on sait qu’aux heures où le trafic est dense, on est, en réalité, très largement au dessus» . La rocade à 90 km/h ? Ce n’est pas la première fois que le sujet est mis sur la table: en 2010, le préfet Jacques Millon avait lancé une étude en ce sens. Initiative prise suite à une impressionnante série d’accidents de poids lourds, entre Les Chauvauds et le plan d’eau de Saint-Yrieix. Si les accidents n’avaient pas fait de victimes graves, ils avaient tous engendré des bouchons monstres. Au final, le projet avait été condamné: l’État a préféré imposer aux poids lourds l’interdiction de doubler. Et le préfet Millon a été remplacé sans aller au bout de son idée. Son successeur, Pierre N’Gahane, reprendra-t-il le flambeau ? Jean-François Dauré a bon espoir: il dit avoir reçu un accueil «très positif» du représentant de l’État. Lequel ne confirmera pas pour le moment: période électorale oblige, il invoque le «droit de réserve».