Les élus départementaux ne souhaitent pas prendre la responsabilité du retour aux 80km/h tant réclamé par eux sur leur routes...Il s faut que cela soit un fonctionnaire de l’État (le préfet) qui assume...)
Transports
En Occitanie, les départements sont majoritairement favorables à l'assouplissement des 80 km/h
Jeudi 16 mai 2019 à 17:52 - Mis à jour le jeudi 16 mai 2019 à 18:30 - Par Bénédicte Dupont, France Bleu Occitanie
Edouard Philippe a ouvert la voie à l'assouplissement de la limitation à 80 km/h sur les routes secondaires sans terre-plein central, laissé à l'appréciation des départements. Dans l'ex-Midi-Pyrénées, on tend vers le retour du panneau à 90, sur certaines portions. Mais la responsabilité questionne.
Le Premier ministre ne voit "aucun inconvénient" à laisser aux présidents de conseil départementaux la capacité de déroger aux 80 km/h sur les routes secondaires, comme le prévoit un amendement porté par le groupe LREM à l'Assemblée nationale. La règle de principe demeurerait pour les routes nationales, mais les présidents de conseils départementaux auraient le pouvoir de relever la vitesse maximale sur certains tronçons de routes départementales, quitte à en assumer les conséquences en matière de sécurité routière.
Le Tarn, la Haute-Garonne, le Gers, l'Aveyron partants pour rétablir les 90 km/h sur certains tronçons... sous conditions
Parmi les présidents de départements qui ont reçu favorablement cette annonce, celui qui s'était le plus positionné publiquement : Christophe Ramond, dans le Tarn. Dès le printemps 2018, le socialiste avait proposé que les élus locaux soient associés à la mise en place de la réforme, quitte à ce que le Tarn soit un département-pilote en la matière. Il voit dans l'annonce du Premier Ministre ce 16 mai "un premier pas mais aussi une manœuvre politique, pour que la responsabilité ne repose pas que sur le président du conseil départemental". Dès janvier, Christophe Ramond remettait en cause l'efficacité de l'abaissement de la vitesse sur les chiffres de l'accidentologie évoquant une double peine "des temps de trajet plus longs et un manque d'attractivité pour certaines communes". Dans le Tarn, plusieurs axes stratégiques pourraient être revus avaient déjà détaillé le président sur France Bleu Occitanie en janvier : entre Albi et Castres, entre Gaillac et Montauban, et les axes qui mènent vers l'Aveyron et l'Hérault.
Dans la même veine, Georges Méric en Haute-Garonne a toujours souhaité pouvoir compter sur une "application différenciée" des 80 km/h. Il l'avait dit dans ses vœux en mars 2018. Aucune étude n'a encore été réalisée pour pouvoir dire cependant aujourd'hui quelles routes seraient susceptibles d'être à nouveau limitées à 90 km/h. En juillet dernier, près de 5.000 kilomètres de routes sur les 6.300 que gère le Conseil Départemental de Haute-Garonne, étaient concernées par la réforme.
Dans le Gers, Philippe Martin se garde bien de prendre un ton triomphateur. Le département a la particularité d'être traversé par de nombreuses départementales, mais surtout par deux grosses nationales d'est en ouest et du nord au sud, la RN124 (Toulouse-Auch-Manciet) et la RN21 (Lectoure-Auch-Miélan). "J’ai du mal à concevoir que les règles puissent ne pas être les mêmes sur l’ensemble du territoire", précise l'ancien ministre dans un communiqué. Et de proposer, si les annonces se confirment, de soumettre à un référendum d’initiative locale, les propositions de modulation des vitesses sur le réseau départemental gersois.
Dans l'Aveyron, l'UDI Jean-François Gaillard a toujours été contre la limitation à 80 km/h. Mais il attend de voir les conditions dans lesquelles s'appliquerait cet assouplissement. La question de la responsabilité est là encore mise en avant. "Le Sénat plaide une co-responsabilité entre le préfet et le département, ça nous parait le plus réaliste. Mais LREM voudrait que seul le Département porte cela sur les épaules", nous explique le service presse du CD12. Mais en la matière, nombre de routes en Aveyron pourraient être réétudiées, dans le Larzac par exemple, plein de lignes droites et de routes plutôt en bon état, où le 80 km/h donne lieu "à des convois de poids lourds".
Prudence plus marquée encore dans le Lot. L'ancien socialiste Serge Rigal regrette que l'expérimentation n'ait pas pu être menée comme il faut à cause des radars vandalisés, "cet assouplissement, on ne s'y jettera pas à corps perdu". Le Lot souhaite en cas de modification, que l'Etat et la Prévention Routière, s'associent au Département dans la prise de décision. Mais avec 4.200 km de routes, souvent peu larges, la géographie du Lot fait aussi que rares sont les axes où on peut, de toute façon, dépasser les 80 km/h.
En Ariège, Henri Nayou avait peu goûté la réforme de juillet dernier mais s'était gardé de le dire publiquement. Lui aussi ne saute pas au plafond avec ce revirement de Matignon. Le président ariégeois s'appuie sur un principe posé par le Conseil d'Etat en 1902 qui stipule que les élus locaux ont le droit de réduire la vitesse de 50 à 30 km/h dans les rues d’une ville mais pas de la passer de 80 à 90 km/h sans la promulgation d’une loi sur les routes départementales. "Avant de se précipiter sur les anciens panneaux, nous allons donc attendre le verdict du Parlement", conclut-il. En Ariège ce sont les anciennes nationales, Pamiers-Mirepoix, Foix-St Girons et Foix-Lavelanet, qui pourraient être revues.
Contacté, le Conseil Départemental du Tarn-et-Garonne n'a pas souhaité faire de commentaires. Christian Astruc n'a jamais mis le doigt dans ce sujet, il ne s'exprimera pas non plus sur un éventuel retour des panneaux à 90 chez lui. "On applique ce qu'on nous dit d'appliquer", se limite à développer le service de communication.
Sur la Gaillac-Montauban, un 80 "trop languissant" et "qui crée trop de tensions"
À Salvagnac dans le Tarn, qu'on aille travailler à Toulouse, au cinéma à Gaillac ou à la clinique à Montauban, tout le monde emprunte la D999, l'ancienne route nationale qui relie Gaillac à Montauban, très empruntée par les poids lourds.
Et les avis, à défaut d'être très tranchés, penchent plutôt vers un retour au 90 km/h. "À 80 km/h, vous êtes stockés derrière les camions, ça bouchonne, certains s'impatientent et déboîtent comme des fous. Je ne suis pas certain du gain en matière de sécurité", concède Bernard qui habite au bord de cette D999. "Et puis 80, c'est languissant on s'endort, rajoute Georgette. À 80 ou 90, les fadas du volant sont toujours là, à plus de 110". Attablés au Relais des deux Vallées, un autre Bernard et Philippe, gendarme ne sont pas tout à fait d'accord. "On s'en fout franchement, 80 ou 90, c'est la même chose, on perd une minute pour aller à Gaillac, deux pour Montauban, c'est rien. Je suis pour qu'on protège les gens", argumente Bernard. "Le vrai problème, c'est les camions. Mais une route passante comme celle-là, une ancienne nationale en plus, on devrait la repasser à 90", lui répond son ami.
La départementale 999, longue de 50 kilomètres, a pas moins de trois radars. Tous ont été ces derniers mois vandalisés ou incendiés. Deux sont de nouveau fonctionnels.