le point de vue du conseil général de la haute-garonne sur le grand contournement de Toulouse :
Le conseil générale de Haute-Garonne a écrit:« le Grand contournement » : une fausse solution aux problèmes de circulation à Toulouse
Lors de sa séance du 29 mai 2006, le Conseil Général a pris acte de l'étude réalisée par l'Etat, concernant d'éventuelles solutions pour soulager la saturation du trafic sur la rocade toulousaine. Cette étude, claire et convaincante, démontre en particulier l'inefficacité de la solution d'une autoroute de « grand contournement » de Toulouse, pour atteindre cet objectif.
Le Conseil Général en tire ainsi les leçons, et conscient des lourdes difficultés de déplacement ressenties dès aujourd'hui, propose des solutions différentes pour éviter un engorgement généralisé de l'agglomération toulousaine.
SOMMAIRE
I Le trafic local : véritable enjeu pour aujourd'hui et demain
- D'ores et déjà , la véritable question est le trafic local :
- Et en 2020 ?
II Les solutions autoroutières envisagées par l'Etat et leur inefficacité
- Doubler la Rocade ?
- Contourner Toulouse ?
- La perspective d'un péage
- Un effet positif très modeste, et de court terme
III Le contournement : "Ni OUF, ni CHUT, ni ZEN"
IV Les objectifs incohérents du "Grand contournement"
V Les solutions prônées par le Conseil Général
- Deux orientations complémentaires sont ainsi défendues par le Conseil Général :
- Des exemples de réalisations du Conseil Général pour un réseau routier plus fluide :
VI Quelle vision d'avenir pour les transports à Toulouse et en Haute-Garonne ?
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Le trafic local : véritable enjeu pour aujourd'hui et demain
D'ores et déjà , la véritable question est le trafic local :
Dans le périmètre de « l'aire urbaine toulousaine » (1078 000 habitants), on compte plus de 3, 6 millions de déplacements par jour, dont 2, 3 millions en voiture.
La majorité écrasante de ce trafic concerne le trafic dit « local », c'est à dire les déplacements dont le départ et l'arrivée se situent tous les deux à l'intérieur de cette aire urbaine.
Le trafic de « transit », c'est à dire les déplacements des personnes qui ne font que traverser cette aire urbaine, est très minoritaire.
La Rocade toulousaine, organisée autour de Toulouse, est aujourd'hui très utilisée pour se déplacer à l'intérieur même de l'aire urbaine. Les déplacements de « transit » n'y représentent que 3 % des déplacements, alors que 71 % des flux sont des déplacements locaux.
Les projets lancés en matière de transports doivent donc avoir pour objectif d'améliorer la gestion de ce trafic local.
Et en 2020 ?
L'étude réalisée par l'Etat se projette à l'horizon 2020. A ce moment, les déplacements auront fortement augmenté, compte tenu du succès démographique de notre département. Le trafic local devrait par exemple progresser dans une fourchette de + 20 à + 26 %.
Mais les parts respectives des différentes formes de déplacement (trafic local ou de transit, trafic d'échange entre l'agglomération et l'extérieur) n'évolueront pas significativement. Le trafic local restera de très loin la première préoccupation en 2020.
On voit d'emblée qu'un « contournement » autoroutier de Toulouse, destiné à capter les déplacements « de passage » par l'agglomération n'aurait qu'un effet très faible pour soulager la circulation sur la Rocade, puisque ce trafic est très minoritaire et le restera.
Les solutions autoroutières envisagées par l'Etat et leur inefficacité
Doubler la Rocade ?
L'étude de l'Etat a d'abord étudié la possibilité d'une mise à « 2 fois 4 voies » du périphérique toulousain. Mais ce chantier susciterait des problèmes redoutables.
Le projet serait très coûteux :
- sur le plan financier : le coût serait de 1 à 1, 2 milliards d'euros (mise à 2 fois 4 voies de la totalité de la rocade actuelle) :
- 300 à 400 millions pour le périphérique Est.
- 700 à 800 pour l'Ouest et le Sud.
A titre de comparaison :
- L'Etat n'a pu consacrer aux aménagements routiers pour l'ensemble de Midi-Pyrénées que 622 millions d'euros, de 2000 à 2006 (contrat de plan).
- Le contrat de plan 2000-2006 consacrait 430 millions d'euros aux aménagements de la rocade toulousaine dont sa mise à trois voies, tous financements inclus.
- Le coût du prolongement de la Ligne B du Métro jusqu'à Labège est évalué à 350 millions d'euros.
- sur le plan social :
La construction demanderait des destructions en zone urbaine. Le chantier qui durerait plusieurs années créerait ainsi de nombreuses difficultés dans la vie quotidienne des toulousains.
- Sur le plan environnemental :
L'équipement serait polluant, et la gestion du bruit serait malaisée.
Le projet aurait en plus pour effet pervers d'être très attractif pour les véhicules, ce qui susciterait une concentration, une augmentation de la circulation et des problèmes qui y sont liés (sécurité par exemple, pollution par émission de gaz à effet de serre).
Contourner Toulouse ?
La deuxième hypothèse étudiée est celle de contourner Toulouse, par la création d'une autoroute « 2 fois deux voix ».
L'Etat a envisagé plusieurs solutions, à l'ouest, à l'Est, et plus ou moins éloignées de Toulouse (de 5 à 35 km).
D'après l'étude de l'Etat, le contournement par l'Est apparaît relativement plus efficace que les autres moyens de contourner Toulouse, car on capte plus de trafic de transit (par exemple un véhicule qui part de Carcassonne pour se rendre à Albi).
Ces projets de contournement supposeraient aussi d'engager des financements massifs :
- le coût d'un contournement par l'Ouest et le Sud serait de 800 millions d'euros à 1,2 milliards d'euros,
- le coût d'un contournement par l'Est seulement serait de 600 à 850 millions d'euros.
- le coût d'un contournement par l'Est et le Sud serait de 800 millions d'euros à 1, 3 milliard d'euros.
la perspective d'un péage
Les défenseurs de la solution d'un « grand contournement » savent qu'il serait difficile voire inconcevable de dégager des fonds publics suffisants pour un tel projet, dont le coût est démesuré par rapport à son impact. L'Etat, qui n'honore pas aujourd'hui sa signature en matière de financement des routes (par exemple les retards pris pour les déviations de Léguevin ou Saint-Béat) risque de ne pas affirmer son soutien.
Ils mettent donc en avant la possibilité de recourir à des investissements privés.
Ceci suppose que l'investissement soit « rentable ».
Rien ne prouve d'ailleurs à ce jour que le « grand contournement », qui ne captera qu'un trafic de transit, puisse intéresser des investisseurs. Mais, en admettant que ces investissements puissent être obtenus, il convient d'en mesurer les conséquences.
En effet, un investisseur privé, en recherche logique de bénéfices, impose la mise en place d'un péage, pour une longue durée (25 à 30 ans couramment dans le cadre d'une concession).
Les conséquences pour les utilisateurs seront ainsi lourdes et durables. Les défenseurs du projet de « grand contournement » ne les évoquent pas publiquement .
Un effet positif très modeste, et de court terme
On s'engagerait donc dans un chantier hyper consommateur de financements, et dont le prix sera répercuté sur les particuliers et les entreprises utilisant la nouvelle infrastructure.
Ce chantier n'aurait de plus qu'un impact de court terme.
Ce type de contournement de Toulouse permettrait en effet de réduire le trafic sur la rocade actuelle de 9 à 15 %. C'est ainsi une solution de courte durée, puisque cela représente 3 à 5 ans d'augmentation du trafic. Ce grand contournement n'aurait en effet aucune incidence sur le nombre de déplacements locaux qui passent par la rocade, et qui sont de très loin les plus nombreux.
Le grand contournement : « Ni OUF, ni CHUT, ni ZEN »
Nous avons vu que le « grand contournement » serait très coûteux, serait très peu efficace pour soulager la rocade toulousaine, et impliquerait la création d'un péage.
Il faut aussi relever que d'autres inconvénients sont cités dans le débat public :
- effets pervers en matière d'urbanisme (encouragement à disséminer l'habitat le long de l'autoroute), qui entraîneraient des nécessités de déplacement supplémentaires ;
- inadaptation aux enjeux de demain (crise énergétique et protection de l'environnement).
Ce projet serait long à définir et à mettre en place, tant en matière d'études que de réalisation. Il serait coûteux, et nuisible en matière d'environnement et d'aménagement.
Construire une telle infrastructure ne peut être décidé de manière légère, car les conséquences sont énormes en termes de bouleversement des paysages, et d'impact sur les populations situées sur et à proximité du tracé.
Tenter d'aborder les difficultés actuelles à travers cet objectif flou est une fausse solution.
Une campagne de communication de la Mairie de Toulouse avait lancé les slogans
« OUF pour la seconde rocade, CHUT pour le second aéroport et ZEN pour le TGV ».
On sait aujourd'hui que le « Grand contournement » ne pourrait nous apporter aucune de ces trois satisfactions : ni gain de temps, ni silence, ni sérénité.
Les objectifs incohérents du « Grand contournement »
L'étude note que plus le contournement est loin de Toulouse, moins son effet est efficace pour soulager le périphérique toulousain.
L'argument selon lequel cette nouvelle infrastructure permettrait de concilier allégement du trafic à Toulouse et meilleure desserte des petites villes pour aménager le territoire de manière équilibrée, est donc infondé.
Il ne faudrait pas confondre la création d'une nouvelle autoroute, desservant des territoires qui ont besoin de se désenclaver et d'être reliés (l'Aude et le Tarn par exemple), ou celle d'une autoroute réalisée pour soulager le périphérique toulousain. Les deux objectifs ne sont pas compatibles, car un contournement éloigné de Toulouse aurait un impact très faible pour soulager les toulousains. Ainsi, à 35 km de Toulouse, un contournement ne capterait que 8000 à 16000 véhicules par jour qui relèvent du trafic de transit.
Pour toutes ces raisons, le Conseil Général considère :
- que l'idée d'un « grand contournement » routier de Toulouse n'apporte pas de solutions réelles aux problèmes de circulation que nous connaissons aujourd'hui dans l'agglomération toulousaine.
- et qu'il est urgent d'envisager d'autres options, car le périphérique est d'ores et déjà en limite de capacité.
Les solutions prônées par le Conseil Général
Ce qui a été parfois présenté à tort comme une « deuxième Rocade », et qui constitue en fait un contournement par l'Est de Toulouse, est ainsi un mirage. Il convient alors d'imaginer d'autres pistes de travail pour aborder réellement les enjeux de la vie quotidienne.
Le Conseil Général, fort de cette analyse, met au débat certaines orientations afin d'anticiper l'augmentation prévisible des déplacements dans l'agglomération toulousaine.
Deux orientations sont ainsi défendues par le Conseil Général :
- Le renforcement du réseau toulousain de transports en commun doit se poursuivre et prendre une nouvelle dimension.
Un effort très important devra être réalisé pour poursuivre les chantiers en cours (ligne B, tramway Toulouse-Blagnac) déployer ce réseau au delà de Toulouse, à l'intérieur de l'agglomération et du département, et pour organiser des systèmes d'inter modalité permettant d'associer des moyens de transport (par exemple train + vélo ou voiture + tramway). Le réseau doit être désormais envisagé dans sa globalité.
- La création d'un réseau de « voirie d'agglomération » ambitieux
La création d'un réseau de voirie d'agglomération, ou « voirie de cohérence » plus praticable doit aussi être à l'ordre du jour, pour fluidifier les déplacements de véhicules au sein de l'agglomération toulousaine.
Elle doit s'articuler avec des « modes doux » à faciliter (vélo, marche...).
La construction de cette voirie (par exemple la réalisation de boulevards urbains reliant des communes de l'agglomération à Toulouse) permettrait de répondre plus rapidement et progressivement aux enjeux de désengorgement de l'agglomération.
Elle demandera une volonté politique forte, tant en matière de financements que de détermination à faire évoluer profondément l'aménagement de la ville.
L'action du Conseil Général pour créer une voirie nouvelle dans l'aire urbaine toulousaine.
Le Conseil Général est prêt à participer à ces évolutions, si un partenariat peut s'engager sur ce point avec le Grand Toulouse et si celui-ci est disposé à réaliser demain l'effort nécessaire.
Depuis plusieurs années, le Conseil Général s'est d'ailleurs engagé dans cette logique, en réalisant ou lançant des chantiers dont l'objectif est de faciliter la vie dans l'agglomération en y apportant plus de fluidité, et en diversifiant les solutions routières.
Des exemples de réalisations du Conseil Général pour un réseau routier plus fluide :
- La réalisation du « fil d'Ariane », effective en 1991, afin de faciliter l'accès à l'aéroport de Blagnac.
- La réalisation de la Rocade « arc en ciel », effective en 1997 (du quartier de St-Simon à l'échangeur de la Crabe ), financée à 100 % par le Conseil Général. Elle a permis de soulager les réseaux de Tournefeuille, Blagnac, Plaisance du Touch, Cugnaux, Colomiers.
- La réalisation de la desserte routière de la zone « aéroconstellation ». Le réaménagement de la RD 1 entre Blagnac et Cornebarrieu a été effectué, et permet à l'A380 de rejoindre les pistes de Blagnac. L'aménagement de la RD 902 entre Blagnac et Beauzelle sera effectif fin 2006. L'étape suivante sera de créer, à l'horizon 2008/2009 une liaison entre la RD 963 et l'itinéraire à grand gabarit qui achemine les éléments de l'A380 vers Aéroconstellation.
- La réalisation de la desserte routière du canceropôle de Toulouse-Langlade, dont le principe et les crédits ont été votés par le Conseil Général. Une étude est en cours pour l'aménagement de la RD 120 (route d'Espagne). La desserte devrait être disponible en 2009.
- Le Conseil Général est maître d'œuvre de la voie du canal de Saint-Martory (déviation de la RD 23), destinée à faciliter la circulation à l'ouest de Toulouse. Cette voie ira du quartier toulousain de Basso Cambo jusqu'à Cugnaux. L'enquête publique a été réalisée, et on peut prévoir sa réalisation pour 2009/2010.
- La décision de créer un nouveau pont sur la Garonne (au niveau de la plate-forme économique Eurocentre) afin de faciliter, à l'horizon 2012, les liaisons entre les entreprises situées sur cette zone et l'ouest de l'agglomération, et de désengorger le nord de Toulouse. Le pont permettra de relier Aéroconstellation à Eurocentre via la RD2, ainsi qu'à la RN 20 et l'autoroute A 62. Les études préalables sont en cours.
Quelle vision d'avenir pour les transports à Toulouse et en Haute-Garonne
Les décisions en matière de transports revêtiront un caractère stratégique de première importance dans les années qui viennent. De grands efforts devront être réalisés.
Pour être à la hauteur, il faudra être clair sur les principes et les exigences qui conduiront la politique des transports :
- défendre le pouvoir d'achat des hauts garonnais, dans un contexte de crise énergétique, et rendre accessible à tous le réseau de transports,
- protéger notre environnement, en particulier en luttant contre les émissions de gaz à effet de serre,
- protéger et valoriser notre qualité et notre cadre de vie,
- concevoir des réseaux à l'échelle de territoires solidaires et non enclins à se refermer sur eux-mêmes,
- conserver la maîtrise publique et démocratique de nos choix en matière d'urbanisme et de transports, et ne pas laisser le soin à des intérêts particuliers d'en décider.
Alors que le développement démographique et économique concerne le département tout entier, il faudra garder à l'esprit que les destins de Toulouse et de la Haute-Garonne sont intimement liés en matière de transports. Le réseau doit donc être imaginé à cette échelle globale.
Il serait ainsi gravissime de voir Toulouse tenter de repousser ses difficultés à l'extérieur de ses frontières. Cette logique conduirait à l'échec collectif, car les difficultés de déplacement des uns sont aussi celles des autres. La rocade toulousaine ne peut pas être soulagée si de nouvelles solutions ne sont pas proposées aux habitants d'autres communes qui viennent travailler tous les jours dans l'agglomération toulousaine.
Nous devons développer ensemble un réseau d'agglomération, partie prenante d'un réseau départemental appelé à effectuer un saut qualitatif. C'est cette vision, fondée sur des territoires solidaires, que le Conseil Général défend. Une vision qui doit reposer sur un service public des transports capable d'imaginer l'intérêt général et de penser à long terme.